Voilà un article que j’aurais du écrire en janvier, juste après le Pitti Uomo et ma rencontre avec Mathieu et Alexandre. Deux frangins qui s’occupent de la marque Kleman, une PME familiale française qui produit en France. Elle fait du bruit depuis quelques années maintenant et c’était l’occasion de poser quelques questions. Ainsi, tu pourras en apprendre un peu plus sur ces chaussures made in France. Et comme toujours, pour éviter l’article bateau, je te présente une série de tenues d’automne autour de leur modèle phare : la Padror.
L’occasion de parler de la création de cette version, et de partager des conseils autour des vêtements à porter avant le grand froid de l’hiver.
La Padror de Kleman, une chaussure made in France qui a une histoire
Découverte de la marque Kleman et son histoire avec l’interview de Matthieu
J’ai pas mal discuté avec Mathieu et pour être sûr de ne rien perdre, j’ai préféré que l’on couche sur papier les infos principales de nos écchanges.
Salut Mathieu, au Pitti tu m’avais raconté l’histoire de ta famille derrière Kleman. Tu peux nous en rappeler les grandes lignes pour nos lecteurs stp ?
Oui c’est mon grand-père René Cléon qui au retour de sa captivité en Allemagne a créé l’entreprise de fabrication chaussures en 1945. Mon oncle puis mon père ont pris la relève. La marque KLEMAN (contraction phonétique de Cléon Manufacture) est née dans les années 1980 et s’est développée grâce aux importants marchés pour chausser l’armée française, la gendarmerie, la SNCF, Air France, etc. Nous restons une PME familiale avec près de 80 salariés aujourd’hui dont 45 personnes dans l’atelier de fabrication. Avec mon frère Alexandre on travaille beaucoup sur KLEMAN et on tente de développer la marque à l’international.
Comment vous est venue cette envie de sortir du marché public et de lancer des chaussures plus mode ?
Nous ne sommes jamais vraiment sortis des marchés publics et nous continuons aujourd’hui de produire pour différentes entreprises et administrations, mais nous avons voulu proposer nos produits au plus grand nombre car nous pensons qu’un produit intemporel et robuste a finalement toute sa place dans la rue.
D’ailleurs, tu peux nous expliquer un peu l’histoire de votre modèle Padror ?
Le modèle PADROR s’appelait en fait PADRE à l’origine 😉 un nom plus fun mais différents aléas techniques ont bousculé son orthographe.
Le PADRE a d’abord été vendu à la SNCF mais il n’est pas propre à un corps de métier particulier.
Il est monté sur notre semelle Edito-Grip qui a des propriétés antiglisse (norme SRA) et résistance à l’abrasion.Le coloris que j’ai aux pieds dans l’article, tu sais que j’adore son histoire, tu peux nous la rappeler stp ?
Oui en fait c’est parfois un mal pour un bien, il y a eu une erreur de fabrication sur cette série de PADROR taupe qui devait être montée sur une semelle ton sur ton kaki, et non pas miel.
Mais le rendu était plutôt intéressant alors on a décidé d’aller au bout. Et te voilà bien chaussé…
Cela montre d’ailleurs une certaines flexibilité de votre outil de production. Cela laisse présager des petites collab’ à venir par exemple un jour ?
Tout à fait, on développe déjà une collab chaque saison. Dernièrement nous avons travaillé avec L’Exception pour une version spéciale du PADROR qui sortira fin mai, et un modèle exclusif pour Knickerbocker qui sortira à l’automne prochain aux États-Unis.
On a parlé de la Padror, mais quels autres modèles sont mis en avant cette saison, est-ce qu’ils ont tous un lien avec un corps de métier comme la Padror ?
On aime évoquer la réédition de la sandale DIMORI cette saison, un ancien modèle Cléon retravaillé sur la semelle Quimper-Grip.
Notre collection d’origine n’est pas construite en fonction d’une spécificité métier, la plupart de nos modèles peuvent chausser le plus grand nombre. L’idée était de proposer des chaussures de travail pour des professionnels qui recherchent une élégance sobre, du confort et de la durabilité. La plupart des modèles sont normés EN ISO 20347 et peuvent répondre à plusieurs cahiers des charges (hors chaussures de sécurité). Ils ne sont donc pas construits en lien direct avec un corps de métier.
On peut toutefois retrouver des exemples de chaussures vraiment spécifiques : les boots SITOX qui ont été conçues pour les douanes, ou les derbies DONATO pour les officiers de la marine française.
Une dernière pour la route, comment imaginez-vous Kleman pur la suite ?
Je te réponds en pleine sortie de confinement alors qu’on est toujours dans une crise sanitaire mondiale. Le contexte est donc très particulier, mais on espère que la situation pourra s’améliorer pour tout le monde. Et bien entendu on a plein d’idées pour la suite, notamment de belles collaborations avec des marques ou des artistes qu’on estime.
Mais le plus gros défi pour nous reste de sauver notre manufacture française car on manquera bientôt de personnel qualifié en fabrication. J’en profite donc pour lancer un appel à quiconque est curieux de découvrir un atelier de fabrication chaussures et peut-être souhaiterait y travailler : nous sommes en Maine-et-Loire près de Cholet, on se fera un plaisir de vous accueillir !
Merci Mathieu !
Je reste très curieux de l’évolution de Kleman en tant que « marque de mode » et comment tout cela va évoluer.
La Padror couleur taupe et semelle miel : un mal pour un bien
Bon du coup, Mathieu a spoilé l’histoire de cette paire et c’est ce qui m’a précisément décidé à choisir cette combinaison.
En effet, j’aime l’imprévu et cela nous rappelle que beaucoup de grands succès sont nés d’une boulette ou expérience ratée. Je te citerais bien le Coca Cola mais mes valeurs ne peuvent plus vanter ce cancer à bulles haha.
Je trouve cette semelle miel parfaite pour contre-balancer les couleur taupe de l’upper et les surpiqures font le lien entre les deux blocs. J’ai comme l’impression qu’ils n’auraient pas pu faire mieux !
Concernant le modèle en soit, la forme est plutôt dynamique dans son design et l’on a une chaussure qui n’est pas pataude. Cela permet de la porter aussi bien avec un jean semi-slim qu’un pantalon à la coupe plus large. Cela peut paraître bête mais il n’y pas dans tant de chaussures qui peuvent passer d’une silhouette à une autre sans faire tâche.
Niveau construction, Kleman garde les standards et normes qu’imposent les marchés publics. On a quelque chose de solide qui te durera plus longtemps que n’importe quelle paire de sneakers au même tarif.
Même si cela n’est pas comparable.
J’aime me dire que c’est une paire Made in France avec un design sympa, une histoire, et qui reste « abordable ».
Au niveau des finitions, je te laisse regarder les photos mais c’est propre. J’anticipe, on n’est pas sur une gamme Paraboot ou Heschung, ce n’est pas le même niveau de prix. Kleman est donc un chouette compromis quand on veut se chausser français et que l’on n’a pas 400e à consacrer à des souliers.
De plus, l’ouverture de Kleman en tant que gamme « mode » est toute récente donc on peut supposer qu’avec le temps et les collab », on pourra aussi voir les cuirs évoluer par exemple.
Un jour peut-être une sortie Kleman x Borasification haha.
3 tenues à porter en automne avec des Padror
Je n’ai pas eu le temps de faire un article sur mes conseils et recommandations de vêtements pour se construire un vestiaire pour l’automne. D’ici un an, je serai passé indépendant et je pourrai te proposer beaucoup plus de contenu. On commence à voir l’esthétique défendue ici depuis le début se propager chez les confrères, nous allons essayer de ne pas se faire absorber !
Du coup, je te propose 3 tenues dans lesquelles tu pourras trouver des idées pour composer tes looks quand le temps se rafraichit.
Surchemise en daim, pull de couleur et jean bleach : s’inspirer des couleurs de la nature
L’automne est la saison où la nature se pare de ses plus belles couleurs, c’est un florilège de nuances chatoyantes. Pourtant, le réflexe pour beaucoup sera de se tourner vers des tenues plus sombres les unes que les autres.
Gris / Bleu / Noir, le tiercé de l’ennui vestimentaire.
On me demande souvent où trouver de l’inspiration pour manier les couleurs et je réponds : « regarde autour de toi ».
(ça ne marche pas si tu vis entouré(e) de béton, enfin si aussi mais je ne veux pas t’amener sur ces couleurs)
Quand vient l’automne, se forme dans mon esprit cette route qui traverse un sous-bois où les troncs d’arbre marrons sont coiffés de jaune et orange sur un matelas de mousse et de terre.
Et bien cette tenue s’en inspire, surement dans l’inconscient. Regarde la prochaine fois que tu te baladeras en campagne ou dans un parc boisé.
Enfin, pour revenir sur les vêtements que je porte, des valeurs sûres pour un look automnal :
- une surchemise en cuir suédé : cela aurait pu être un blouson en daim style Valstar ou un bomber. L’idée ici est d’avoir une couleur terre donc de marron à beige ou crème.
- une pull en laine ocre / brique : en gros des nuances de jaune ou orange, sans être criardes. J’utilisais la comparaison avec les feuilles de cette saison car ce sont vraiment ces teintes qui sont agréables et viendront donner du punch à ta tenue sans jurer.
- un jean délavé clair style Levi’s 501 bleach : bon, c’est un APC ici mais les Levi’s d’occasion qui pullulent sur Vinted sont dans ce style. Idéalement, un jean brut que tu auras toi-même patiné avec le temps serait encore mieux.
- une paire robuste : qui ne craint ni la pluie ni la gadoue. La thématique étant la Padror de Kleman, elles s’y prêtent très bien. Une paire de boots type brogues aurait pu aussi être chouettes, avec semelles commando.
- ajouter une écharpe courte : je ne suis pas un amoureux d’écharpe mais les courtes à la mi-saison apportent un truc sympa et dépannent s’il y a du vent. J’ai choisi un motif pied de poule mais ici, ajouter une touche de rouille aurait pu être sympa.
Voilà une première proposition pour être stylé en automne avec des couleurs chatoyantes. En plus, tu peux mixer un peu les couleurs selon les pièces et avoir des variantes vraiment sympas.
À toi de jouer !
Parka légère et jean blanc même en automne
Ce n’est pas encore pour cette fois mais oui je planche sur un article autour du jean blanc.
En tout cas, l’un des conseils principaux pour bien porter son jean clair, c’est de ne pas avoir peur de le tâcher. Avec du recul, je me rends compte qu’au final, c’est un vêtement que je vais plutôt prendre plaisir à revêtir en automne, quand vient le mauvais temps.
Pourquoi ?
Et bien parce que là encore,il va apporter un peu de lumière dans ce quotidien grisâtre.
Je déconne sur la tournure de phrase, mais tu as saisi l’idée !
Pour cette seconde proposition de style en automne, j’ai mis l’accent sur :
- contraste de couleurs foncées et claires : j’ai choisi de mélanger les tons blancs / beiges avec du marron et de l’olive. Un blog de mode te dirait de ne jamais encadrer ton pantalon blanc de pièces foncées. Il a tort. En fait, il faut simplement que les transitions soient douces sans couleur franche.
- une parka légère : c’est un vêtement à posséder en automne cet outerwear. Le mieux est d’avoir une doublure amovible pour qu’elle te serve également quand le temps se refroidira. Privilégie une teinte olive / marron / kaki
- un bon pull grosses mailles : il sera ton gars sûre pour te garder au chaud. La parka coupe du vent et protège de la pluie, le pull chauffe l’intérieur. Comme des murs bien isolés et une cheminée.
L’avantage de ce type de combo, c’est que tu gardes une certaine élégance et peux donc aussi aller bosser si tu es dans un domaine du tertiaire sans uniforme.
Pour le pull grosses mailles, un classique de l’habillement, homme ou femme, c’est l’occasion de te montrer celui que je porte. C’est le fruit de la collaboration entre Atelier Particulier et Inis Meain, les fameux pulls des îles Aran. Il est tricoté avec un fil de laine mérinos vraiment super doux que Zegna appelle le « baby merinos« . C’est une appellation marketing du fournisseur mais la réalité est que le pull te fait des câlins.
Ce qui contraste avec le design rugueux de ce type de pull irlandais.
Il existe en 2 autre couleurs : bleu marine et vert. Peu téméraire, je suis parti sur le coloris le plus classique. J’aime les pull torsadés dans les tons sable et beige où les détails du tricots sont les plus visibles. En plus, ils sont super polyvalents et s’accordent avec un maximum de tenues.
Seule la partie des épaules aux pectoraux est à motif. Un choix intéressant, notamment pour pour porter avec une veste (en tweed), je trouve cela vraiment visuelle.
Pour plus de détails, je te laisse lire la présentation sur le site d’Atelier Particulier.
Quoiqu’il en soit, dans cette tenue, il forme un bon duo avec ce jean tapered blanc cassé. Que je porte plus taille haute que d’habitude. Je ne suis pas loin du camel toe haha.
Enfin, aux pieds donc les Padror de Kleman et une paire de chaussettes écrues.
Elles facilitent la transition entre pantalon blanc et chaussures foncées.
Ma parka Our Legacy et cette paire ont été créées pour se porter ensemble. Je trouve que les teintes se répondent à merveille, sans faire matching.
Une surchemise en laine épaisse et un gilet
On termine ce triptyque de looks autour de la Padror de Kleman avec un exemple de layering pratique pour la saison.
En effet, l’automne est peut-être LA saison de la surchemise en laine. Ce moment de l’année où si tu n’as pas 15 manteaux ou blousons dans ton armoir en fonction du temps, elle te sauvera la mise.
Les marques l’ont bien compris et tu as une offre conséquente devant toi. Quelques conseils pour t’aiguiller sur le choix de ta surchemise :
- les volumes : par pitié, pas de coupe ajustée pour une surchemise. C’est comme une veste au final, tu dois pouvoir passer un sweat ou un pull dessous sans finir saucissonné(e). Favorise les coupes droites avec une emmanchure pas trop haute. Et fais gaffe à la taille : « qui peut le plus peut le moins« .
- la longueur : rien de plus laid qu’une surchemise trop courte, vraiment. Même si tu as un style classique et plutôt slim-fit, elle ne doit pas être aussi courte que tes chemises casual. C’est se tirer une balle dans le pied et beaucoup de marques se trompent donc prudence.
- des (grandes) poches : ça peut paraître évident mais une surchemise sans poche => vêtement mal pensé. De plus, elles doivent être grandes et faire partie du design. Sans quoi, son allure est vite bâtarde. Si elle a en plus des poches façon work jacket en addition de celles à la poitrine, fonce.
- la matière : j’aurais tendance à te pousser en priorité un drap de laine ou du velours. Il faut que ta surchemise soit épaisse , enfin plus épaisse qu’une chemise ou même un pull. En revanche, pas trop non plus car elle devient vite pénible à porter en layering une fois l’hiver arrivé. Si tu dois en avoir qu’une dans ton vestiaire, évite les surchemises rembourrées par exemple, elles manquent de fluidité et sont vite disgracieuses en mouvement.
- des motifs / textures : c’est le moment de te faire plaisir avec une laine bouillie, un pied de poule ou ce genre de motifs que l’on retrouve souvent sur les manteaux par exemple. Si tu portes ta chemise en top layer, ça lui donne la prestance d’une veste, et en mid layer, un touche de peps.
Avec cela, tu as quelques pistes pour décortiquer l’offre sur les différents e-shop et te faire plaisir. N’oublie pas, laisse aussi parler le feeling !
Dans la tenue, je porte en-dessous un pull torsadé Aran Isles bien épais qui amène une petite touche de clarté dans ce layering d’olive et marron.
L’autre pièce à ne pas négliger durant la saison, c’est le gilet sans manche.
(pléonasme mais c’est pour être compris de tous)
Je prépare un gros dossier sur le sujet, ça va prendre un peu de temps.
En automne, le gilet, c’est franchement un must have et tu peux le porter :
- en dernière couche : comme ici, par-dessus une surchemise, un pull ou encore un sweat-shirt épais. Selon le temps, tu as des gilets doublés / rembourrés, avec ou sans col.
- en couche intermédiaire sous une parka ou un manteau : un exemple ici. il apporte une couche de chaleur en plus et c’est un gimmick de style sympa.
- Bonus : tu peux aussi le porter par-dessus ton outerwear mais, il y a un mais, il doit être prévue pour. Tu peux vite finir tout engoncé(e) et c’est un peu ridicule. Inspire-toi d’un mec comme Nikko.
Ici, j’ai opté pour la première option. Le gilet est en velours côtelé olive avec une doublure à motif pied de poule. Il ne fait qu’un avec la surchemise dont le drap de laine est vraiment rustre. Ne nous mentons pas, cette pièce est à porter en extérieur car elle picote pas mal.
Engin, tu l’auras peut être remarqué article après article, mais quand je porte beaucoup de pièces sombres en haut, je préfère casser avec un jean délavé plus clair.
Les tenues toutes en nuances d’olive et marron, c’est très beau, instagramable mais je n’aime pas tant que ça les porter.
En fait, j’aime simplement être en jean je crois, plus que tout.
Ici, c’est vraiment un look de tous les jours que je vais aimer porter souvent et qui est modulable en changeant les pièces du layering.
D’ailleurs ce jean APC dont le délavage est très proche des Levi’s 501 vintage, très clair après une dizaine d’année de port et de lavage en machine. Cela lui apporte une touche trendy avec la mode actuelle.
On l’a vu sur la première tenue, lui et ces Kleman vont plutôt très bien ensemble alors go.
Et le coté tout terrain de la Padror en couleur olive est plutôt cohérent avec cette tenue pour aller se balader dehors ou dans les bois.
Un dernier mot sur les Padror de Kleman
Certaines photos dormaient dans mon disque dure depuis un an et pourtant, j’aurais refait les tenues à l’identique. C’est un exercice intéressant pour moi car je peux avoir confiance en ce que je te partage comme conseils !
Vous avez été nombreux à me demander de sortir mes propres guides de style et de conseils, notamment pour débuter quand on se cherche un style.
J’y travaille, c’est promis.
Concernant cet édito sur Kleman et la Padror :
- tu a le site de la marque ici
- le modèle Padror en question coloris taupe et semelle miel
- et l’ensemble des revendeurs de la marque sur ce lien
Avec cet article, c’est aussi soutenir à mon échelle made in France, sans tenir compte des rivalités, tant que le style est là et que ça peut être utile à toi aussi !
Marques françaises (et d’ailleurs), n’hésitez pas à me renvoyer l’appareil un jour 🙂
+++