Aujourd’hui, je t’amène (littéralement) avec moi dans un atelier historique où l’on confectionne entre autres, des manteaux et blousons en laine: Lener Cordier. C’est avec l’équipe de The Good Goods, Régis, fondateur de L’Exception et Trésor, que je me suis rendu dans le nord de la France pour découvrir et suivre étape par étape la fabrication des manteaux de la collection L’Exception. Un journée aussi intense que riche où j’ai rencontré de belles personnes, appris un tas de trucs et bien rigolé.
Je vais essayer de te retranscrire un peu de tout ça.
Cet article nous a été commandé par nos amis et partenaire de The Good Goods afin de couvrir la partie stylisme de leur mise en valeur du savoir français au travers de cette collection made in France L’Exception Paris réaliseé par les ateliers Lener Cordier.
Plongeons au cœur de la confection d’un manteau fabriqué en France
The Good Goods était là pour tourner un reportage sur l’atelier et la collection de manteaux L’Exception. J’étais curieux de voir le déroulé de cette journée où on peut parfois tomber dans la « démonstration » commerciale, avec « l’effet caméra » (j’ai inventé, y a aucune étude sur le sujet). Et bien, il n’en fut rien. Nous avons été reçus à la cool, et nos hôtes d’un jour ont été chaleureux et disponibles. Surtout, sans filtre ni faux-semblant, les joies, les difficultés, c’était une immersion totale.
Les ateliers Lener Cordier, 70 ans d’histoire
C’est donc à Hazbrouk dans le nord de la France que l’on découvre cette entreprise familiale fondée en 1954 par Marguerite Cordier, la grand-mère de Frédéric, actuel gérant. Ses enfants, Mathilde et Luca, sont la quatrième génération.
Lener Cordier est spécialisé dans les pièces à manches où il regroupe tous les métiers du vêtement de la création à la confection: styliste, modéliste, couturière…
C’est l’héritage de ses parents, qui ont fait en sorte de toujours garder la création en vie dans leur entreprise, même quand chaque entreprise du genre devenait peu à peu un « simple » façonnier.
En presque 70 ans d’existence, l’entreprise a tout traversé.
L’âge d’or post guerre mondiale puis les 30 Glorieuses, le développement des grandes enseignes, la mondialisation et même le dépôt de bilan frôlé au milieu des années 80.
Lener Cordier s’est constamment adapté en se reposant sur son savoir-faire.
Mais ça, je te laisse le découvrir en détail dans le podcast Onward Fashion où Victoire revient avec Frédéric et ses enfants sur leur histoire, leurs marques, l’économie de made in France et bien d’autres sujets: ici pour l’écoute.
Aujourd’hui, elle a plusieurs marques comme Chemin Blanc, Maison Lener, Trench&Coat et continue à travailler en marque blanche pour de grandes enseignes et comme façonnier.
C’est d’ailleurs ce qui nous amène à la collection de manteaux et blousons L’Exception, fabriquée à Hazebrouck.
Un défi puisque historiquement, Lener Cordier ne travaillait que sur la femme.
L’Exception Paris, la marque du e-shop éponyme
L’Exception est un e-shop français qui a fêté récemment ses 10 ans.
Avec d’ailleurs une présence physique puisqu’ils ont une boutique à La Caserne, le plus grand espace dédié à la mode responsable en Europe.
À l’origine spécialisé dans les marques françaises, le shop a enrichi son offre de marques fortes à la qualité et au savoir-faire reconnus. C’est notamment comme ça qu’ils ont rentré des marques japonaises comme Orslow ou Reproduction of Found.
Régis, co-fondateur, a pensé le projet d’une ligne de vêtements avec comme idée la création d’un vestiaire made in Europe avec des vêtements classiques bien faits. Pour cela, il est accompagné de Rémi (co-fondateur de Éditions MR) qui s’occupe de la direction créative.
Je t’avais d’ailleurs parlé de leurs sneakers à l’automne dernier.
Le vestiaire proposé est, si l’on devait le mettre dans une case, proche du style casual chic à la française.
Et pour leurs manteaux et blousons d’hiver, Régis tenait à proposer des pièces faites en France.
C’est comme ça que l’aventure a débuté avec Lener Cordier.
Preuve que la relocalisation de nos savoir-faire repose aussi sur un effort de marques ambitieuses afin d’être en soutien, voire de pousser les ateliers à se dépasser.
Au final, L’Exception Paris propose une gamme déjà bien étendue pour l’hiver, qui va du manteau long classique au blouson type aviateur, en passant par le Mac coat en laine.
Ah, et une coupe oversized sur un manteau ceinturé.
Maintenant, allons voir comment et par qui ils sont fabriqués.
Retrouve la gamme de manteaux L’Exception Paris ici.
Immersion dans l’atelier qui fabrique les manteaux de L’Exception
J’étais là en observateur mais j’ai pris très peu de notes. Je savais que TGG allait sortir une vidéo carrée alors j’ai préféré penser cette partie autrement.
D’ailleurs, je te laisse le lien de l’épisode de French-Façon là.
Instant vis ma vie à venir mais c’est nécessaire pour saisir ce qui va suivre.
En effet, je suis fils d’ouvriers et j’ai fait partie de ces familles françaises frappées de plein fouet par la mondialisation et la délocalisation de l’industrie française.
Ce ne sont pas les meilleurs souvenirs d’ambiance à la maison que j’ai.
Plus tard, j’ai bossé plusieurs années en intérim dans des dizaines d’usines là aussi. Des années où, un peu perdu, j’avais conscience qu’il faudrait vite se retrouver. Ce n’était pas drôle, aussi dur physiquement que mentalement. Je me souviens encore à l’époque avoir été choqué par la façon dont les gens étaient traités. Sans parler d’esclavage hein, mais il y avait une suffisance des cols blancs saisissantes, où que je sois passé.
Si je te raconte tout ça, c’est que tôt le matin, en passant le rideau de plastique de l’atelier, je me suis retrouvé 10 ans en arrière.
La luminosité, les bruits et les odeurs m’étaient familiers.
Des frissons, une émotion « chelou », entre le sentiment de sentir dans un lieu connu et l’effroi de souvenirs pénibles.
Je ne dis rien et baisse un peu la tête.
J’avais ce souvenir des visites de clients qui te regardaient comme une bête de foire, malaisant. D’ailleurs, les employés en CDI n’étaient jamais coopératifs.
Et bien là, tout s’est très vite dissipé.
J’ai vu des femmes avec le sourire, nous expliquer ce qu’elles faisaient avec un plaisir palpable.
C’est con mais ça m’a touché doublement, cette fois-ci en bien.
Dès lors, je savais que ma journée serait incroyable et qu’on rigolerait bien.
J’ai trollé certaines couturières, j’en embêtais d’autres, et je me suis bien fait chambrer quand j’ai montré mes (dramatiques) limites au repassage.
Savoir qu’un atelier comme celui-ci reprend du poil de la bête en France, et dans ces conditions, où l’ambiance ressemble finalement plus aux métiers du tertiaire que j’ai connus (avec la rigueur que nécessite quand même la production bien sûr), c’est kiffant.
En plus, ces femmes ont un savoir-faire de dingue!
« Ces filles ont de l’or dans les mains » – Olga Bogaert, coordinatrice technique à l’atelier.
Et j’ai pu le constater, entre sourire et pudeur.
Les principales étapes de conception d’un manteau homme de la collection L’Exception
Je me répète mais l’accueil a été génial et chaque femme que l’on a rencontrée a pris le temps de nous montrer ce qu’elle faisait.
Certaines en toute détente, force tranquille, d’autres plus jeunes, un peu stressées.
Le stylisme: design et modélisation
Avant de fabriquer quoique ce soit, il faut déjà dessiner.
C’est là que Lætitia, la styliste en chef intervient. Là depuis 20 ans, elle est un puit de connaissance.
Logique.
Dans le cas du manteau L’Exception, il fallait partir des idées et croquis du client pour en faire un dessin technique exploitable par le modéliste.
Pour les marques de l’atelier, elle dessine bien sûr tout, comme ce super Trench coat oversize (@Laetitia si tu me lis: faut le sortir!)
Le stylisme: choix des tissus
Il intervient quasiment au même moment puisque la matière détermine aussi les faisabilités techniques (marges de coutures, coupe…).
Pour les manteaux l’Exception Paris, ce sont des draps de laine d’une maison italienne.
Le stylisme: patronage / prototype
Le job du modéliste est de modéliser comme son nom l’indique, c’est à dire de passer d’un dessin (technique) à une toile en 3D sur mannequin. Le manteau découpé en calques, qui sont les pièces à assembler.
Une fois que le patron est validé, on monte un prototype à l’atelier dans la matière finale afin d’être sûr que tout est ok. Des métiers clés de la confection puisque ce sont eux qui déclenchent la production.
La production: la découpe laser
La matière arrive en rouleau et la découpe est primordiale puisque c’est là que les calques du modélistes sont sollicités. Les rouleaux sont donc découpés au laser à l’aide d’une machine moderne.
Chaque pièce du manteau est faite de la sorte.
La production: thermocollage et bolducage
Une fois les pièces récupérées, on leur applique une fine toile de tissu à fibre qui va permettre, une fois passée dans un « four », d’assurer de la tenue au manteau.
Le bolducage est la finition sur les extrémités du tissu, là aussi avec une bande collée à la vapeur.
La production: assemblage
Je te passe les détails, c’est peu parlant à l’écrit.
En gros, c’est là qu’interviennent les couturières pour coudre chaque partie, ainsi que la doublure.
Le truc marrant, c’est que pendant que Malika, la responsable d’atelier, nous expliquait les détails techniques, on voyait le manteau prendre forme.
On a pu avoir la démonstration d’un type de couture invisible pour le bas des manteaux fait à la Strobel, une ancienne machine.
Truc de gosse, je trouvais le design ouf, on aurait pu croire un robot sorti de Goldorak.
La production: la pose de griffe
Faite avec des points faits mains, c’est un détail qui a du charme, et qui prend là aussi du temps.
La production: boutonnières et boutons
Alors ici je connaissais un peu puisque j’avais déjà vu des machines similaires pour les boutonnières de jeans.
Pourtant ça reste toujours impressionnant à chaque fois.
Même si comme pour chaque étape, la couturière suit le dossier technique à la lettre, j’avais la pression pour elle. Quasiment la dernière étape, mal réveillé, tu foires la boutonnière, ce sont des heures de travail perdues.
Bref, les métiers manuels n’ont pas (ou rarement) le « ctrl+z ».
La production: le repassage final
Ça peut paraitre bête mais l’étape est super importante.
D’autant plus pour des manteaux de cette gamme. Le client de l’Exception, peut-être toi demain, ferait la tronche si la pièce arrivait en bouchon.
Et puis ça permet un dernier contrôle de mesures.
Voilà le manteau est prêt et j’ai pu essayer la pièce faîte dans la journée. C’est quand même chouette de se dire qu’en moins de 10 jours, une série de manteaux peut être produite et disponible à la vente en France, sans traverser la planète, ni même l’Europe dans le cas de notre manteau L’Exception Paris.
Mais suivre la conception d’un manteau, c’est quand même plus parlant en vidéo alors je te mets le lien du reportage de The Good Goods ici et le récap’ de nos stories là.
Stylisme autour du manteau coupe oversize L’Exception
Allez on entre dans le coeur de notre savoir-faire à nous: le stylisme. Valoriser ces manteaux, ça passe aussi par montrer ce que l’on peut faire avec. En plus, il y a dans la collection de L’Exception un manteau qui semblait dessiné pour ce que l’on aime le plus ici.
Quelques photos des détails
Sans surprise aucune, j’ai choisi le manteau long à la coupe oversize.
Durant la visite du bureau d’étude, j’avais passé une version dans une laine incroyablement douce, j’avais gardé en tête la coupe, qui déboitait.
En préparant cet édito, j’ai regardé plus en détail et découvert cette version dans une laine à motif, quelque part entre le prince de galle et le pied de poule.
Coup de foudre immédiat.
Il m’a rappelé les manteaux vintage, souvent femme, que l’on peut voir en friperie, jamais coupés comme il faut.
Manches raglan sans boutonnières, grandes poches plaquées bas sur le manteau, j’étais chaud.
En plus, la laine est souple et on évite que l’épaule se marque de façon disgracieuse.
À noter qu’il possède une ceinture, que je ne n’utiliserai pas.
Et à l’essayage, le charme n’a pas été rompu.
Je te montre tout ça dans une tenue.
Look Street heritage chic
Le titre est pour rigoler mais il y a toujours une part de vérité.
Ce motif sur cette coupe de manteau permet d’amener une vibe street chic.
Un peu l’héritage que l’on retrouve dans les marques new-yorkaises Aimé Leon Dore et Noah.
En effet, si je dis que le manteau fait tout, c’est simplement que la tenue est 100% basique dans l’esthétique proposée ici.
Parce que un hoodie, un jean size-up et une paire de Michael like, c’est ce que je te propose depuis des années.
Là où ça devient intéressant, c’est de se servir des couleurs du motifs du manteau pour amener des touches similaires dans le choix des autres pièces.
Le bonnet par exemple ou encore le hoodie dans un vert sapin puissant.
Le jean Borali tranche pour éviter de faire un ensemble camo du motif du manteau
(je ne sais pas si tu as suivi haha)
Une chose que je ferai surement dans les semaines à venir: réduire la longueur des manches.
Rien de dramatique, ça va avec le flow oversized, mais pour ceux que que ça peut inquiéter, ça se retouche facilement. C’est pour ça que j’ai souligné avant les manches sans boutonnières.
Ici un simple ourlet et c’est réglé (et donc pas très cher, ça reste le nerf de la guerre)
Enfin une chose est sûre, je vais le poncer cet hiver, j’en suis amoureux et tu le reverras bientôt.
Tu peux retrouver ce manteau oversize ici.
Conclusion
On parle beaucoup de savoir-faire, moi le premier, mais ce sont le plus souvent des mots lus ici et là. Vivre l’expérience en immersion, c’est vraiment quelque chose de particulier. Je l’avais déjà compris lors de précédentes visites d’ateliers, petit ou grand, moderne ou old school.
La visite chez Lener Cordier a renforcé ce sentiment.
Dans le vêtement du moins, en France ou Japon, j’ai pu remarquer que lorsqu’il y a savoir-faire, il y a une ambiance différente.
Les gens sont valorisés et ça change tout.
Et aujourd’hui, au-delà de la pièce et des marques, savoir à qui j’achète compte aussi. Ça n’engage que moi et reste somme toute relatif.
En tout cas, la collection de manteaux et blousons en laine de L’Exception Paris est réalisée par des personnes adorables et participent à redévelopper cet atelier. En plus de proposer des pièces de choix made in France à prix contenus (oui la valeur du travail se paie), la gamme est riche dans la mesure où se mêlent des classiques et du plus audacieux.
De quoi satisfaire tout le monde!
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Merci à toute l’équipe d’Atelier Lener Cordier pour l’accueil: Olga, Malika, Lætitia, chaque couturière, Frédéric, Marine, Jérémy et bien sûr la team TGG: Louise, Victoire et Thib ainsi que Régis, son chien et le reporter Trésor (je vous partage son podcast ASAP)