Allé, je sors de ma poche la toute dernière tenue shootée avant le confinement. D’ailleurs, c’est aussi celle que je portais au Pitti quand j’ai été invité par les amis d’Overlord. Je n’ai jamais pu revenir sur ce petit moment puisque tout a basculé quelques jours après. J’essaierai de prendre le temps durant ce long mois encore confiné. Aujourd’hui donc, on va voir une tenue où je porte un de ces motifs qualifiés il y a encore peu comme vieillot. Sans être le guide sur le sujet, on va voir comment l’on peut porter une veste pied de poule dans une tenue qui ne soit ni casual chic ni sartorial.
Comme toujours, on teinte notre démonstration de la sensibilité street heritage pour faire le pont entre le passé et notre époque.
Porter une veste motif pied de poule sans faire vieillot
Le motif pied de poule est redevenu tendance ces deux dernières années, avec un gros coup d’accélérateur cet saison. On en a vu partout et a toute les sauces. Et c’est tant mieux, c’est un chouette motif.
Comment porter une veste motif pied de poule ?
Je ne sais pas si il y a une règle universelle mais je vais te montrer pourquoi j’ai choisi la mienne et comment je vois les choses sur le sujet.
Inspiration vintage mais design moderne – des pièces street heritage
Le style street heritage, c’est piocher dans les pièces classiques / vintage et porter le tout avec modernité et dynamisme. En gros du sampling. Si tu peux le faire avec des pièces de friperies ou de fast-fashion sans soucis, ça reste plus « facile » quand tu peux directement piocher dans des marques qui font ce travail de stylisme en amont.
Dans cette tenue, j’ai pu lâcher les chevaux et me faire plaisir sur deux pièces de « haut niveau ».
Alors avant de discuter de la tenue, je reviens dessus rapidement.
Engineered garments Loiter jacket – un motif pied de poule atypique
C’est une longue histoire cette veste ou plutôt ce coloris, parce que c’est de lui dont il s’agit. C’est un motif pied de poule créé pour la collection FW19 de la marque japonaise Engineered garments, qui répond au doux nom de : Tan Green Wool-Gun Club Check.
Quand je l’ai vu sur le preview de la collection hiver l’été dernier, je suis tombé amoureux. Au point de me dire « je casse mes économies et je prends le complet retail ».
Pourquoi ?
Et bien c’est simple, je n’avais jamais vu cette combinaison de couleurs sur un motif pied de poule. Il était comme nuancé d’un vert olive et c’est ma couleur favorite à porter, avec l’indigo. J’ai vu là une polyvalence idéale pour mes tenues typées workwear military.
On y reviendra mais ça a été un parcours du combattant pour avoir le costume. J’ai poussé le truc à fond.
En attendant, j’ai fini par jeter mon dévolu sur le modèle Loiter jacket (tu te souviens, on l’a vu récemment ici). Une coupe bien boxy, sans structure, qui peut se porter avec des pantalons ou jeans larges sans aucun soucis. Les épaules sont tombantes, de grosses poches plaquées à rabat et doublée seulement aux manches.
Une vraie pièce trait d’union entre héritage et modernité.
Un truc que je chéris par-dessus tout : les manches sont relativement courtes. Je ne sais pas si c’est le fait d’être de taille modeste et d’avoir souvent eu à composer avec des manches un peu longues mais c’est un booster de silhouette. Cela donne tout de suite du dynamisme à la pièce, d’autant plus important quand on est sur des tissus dit « de papy ».
Visvim Jumbo sweat crew – une coupe street et savoir-faire ancestral
Un lecteur me faisait remarquer récemment que je ne portais plus trop de Visvim ces derniers temps et il avait raison. Du moins sur Instagram.
Alors qu’entre-nous, je reste un amoureux du travail d’Hiroki Nakamura. La poésie, le détail et ce qui se dégage des pièces Visvim, aucun autre label ne l’atteint. Tout considération de style mise à part, je dirais qu’il est au street heritage (il appelle cela le new vintage lui) ce qu’est Rick Owens au darkwear.
Mais l’hiver, peut être parce que ses outwear sont hors de prix même en chinant, j’ai tendance à moins en inclure dans mes looks. Et le petit virage street sartorial que je prépare depuis deux ans sous l’influence de pièces EG ou 1st Pat-rn joue aussi.
Bref, pour en revenir à ce sweat, le fameux Jumbo Crew de Visvim, c’est tout simplement une de mes plus belles pièces du label.
C’est la grande mode du vintage et donc du retour du sweat. Quand tu en as toujours porté, tu ne peux que te réjouir et pourtant, l’offre ne me fait pas plus rêver. Entre les sweaters bien slim qu’il faut size-up (pour mes goûts perso) ou le sweat vintage trop souvent difforme, je suis souvent frustré.
Pas simple.
Pour Borali, j’ai dessiné le sweat de mes rêves il y a quelques années. Quand j’ai reçu ce Jumbo, j’ai cru le voir.
Avec en bonus les couleurs et teintes que seul Visvim sait faire.
(je te passe les détails sur la douceur du coton ou quoi, c’est sans commune mesure avec ce que j’ai eu jusqu’ici)
Coup de foudre à Boulogne Billancourt.
Layering de mi-saison et nuances d’olive
Revenons à la question de comment porter une veste à motif pied de poule sans donner l’impression de l’avoir volée à son grand-père.
Déjà, il faut éviter le padding excessif aux épaules et l’excès de cintrage. Tu te doutes, je ne vais pas te distiller des conseils style casual chic ici, Internet en regorge de judicieux.
(même si Julien avait sorti un article très intéressant où se mêlaient coupes ajustées et style héritage)
En effet, j’ai mis du temps à porter une veste motif pied poule car je voulais avoir un fit relax. Que le coté strict et habillé qui s’en dégage soit cassé par une certaine « désinvolture » (j’ai envie de me gifler en écrivant cet adjectif haha).
L’idée ici est donc de porter la veste à la cool avec un layer de pièces connotées street, bien chill.
Le sweat est loose, le col arrondi distendu pour laisser le tee débordé. L’art du layering débrayé !
Le but est de s’émanciper des codes de l’élégance classique qui appelleraient un beau cintrage, une chemise rentrée, voire même un veston, pour aller vers une harmonie de volumes. Le jeu de couleurs vient ajouter la petite touche de douceur pour que cela ne fasse pas trop « criard ». Même si celui-ci est relativement discret, un motif pied de poule est quand même quelque chose présent visuellement et il faut le calmer.
Des accessoires
Je disais vouloir casser le coté classique du motif pied de poule en le modernisant, les bijoux sont nos amis. Pas de règle ou quoi, les accessoires sont quelques choses que tu dois sentir et avoir envie de passer. Article après article, je te présente ceux que je porte et aime. Encore plus maintenant que nous créons nos colliers et bracelets Borali.
Mais cela ne veut pas dire que dire que ce sont les seuls. Il y a une grosse part d’affect et de goût personnel dans le choix de ses accessoires.
Après, on peut quand même faire de grosses erreurs, fais gaffe !
Ici moi je suis parti sur la combinaison que j’aime le plus : bijoux en argent et tissus recyclés.
Mes plumes en argent de la maison japonaise First Arrow’s ramenées du Japon et un collier Borali autour du cou. Je m’amuse à faire des jeux de longueur. Au-delà d’aimer en porter pour l’objet, ça habille aussi le haut et permet d’amener un second niveau de couleur.
J’ai opté pour des couleurs qui viennent se mélanger au camaïeu de verts olive.
Enfin, une série de bagues en argent vintage. Toutes chinées ici et là au gré de balades en brocante, sauf une. Il s’agit de ma chevalière en argent martelé qui vient de chez une créatrice que j’adore et dont je vous parlerai bientôt plus en détails : Gilbert Gilbert.
Post-confinement, je vous prépare quelque chose de lourd !
Moi qui n’était pas du tout bague il y a encore un an, je me demande comment j’ai pu être aussi obtus !
Porter un jean size-up … vraiment trois tailles au-dessus
Le style street heritage, c’est une une approche dans le choix des pièces et de comment les porter. C’est étroitement lié à une silhouette dynamique (agressive comme j’aime dire), donnant à une tenue quelque chose d’actuel et loin du 100% vintage. La façon dont on va porter son jean ou pantalon est la pierre angulaire de la silhouette.
Importance de la longueur « au plus court »
J’ai reçu pas mal de messages depuis le confinement me demandant un article sur comment porter le jean size-up et les coupes plus amples et larges. Je travaille dessus car ce sont des notions proches mais différentes.
En attendant, dans cette tenue je porte un jean wide tapered que j’ai pris deux bonnes tailles au-dessus, pour ne pas dire trois.
Pourquoi ?
Et bien je me suis planté dans le sizing et je n’aime pas renvoyer mes vêtements. Je pollue déjà assez comme ça.
De plus actuellement, je travaille sur le jean Borali. Enfin, ça va faire 5 ans que j’ai en tête la coupe que je veux alors j’étudie et apprends en attendant de pouvoir le patronner avec un modéliste professionnel.
Je nageais dedans mais il m’intéressait. Alors j’ai voulu le porter quand même parce que porter un jean size-up coupe tapered et un jean droit, ça ne donne pas le même rendu. On y reviendra.
Le seul conseil à te donner dans l’immédiat si tu veux porter des jeans sur tes hanches en les choisissant trop grands : c’est de raccourcir la longueur au plus court.
Tu gardes une lignes de jambes dynamique et ça ne tassera pas. Même en portant des hauts plus longs afin d’équilibrer ta silhouette.
Prudence s’il s’agit d’un brut : soit tu lui fais un soack avant la retouche, soit tu laisses une petite marge. Moi je suis un peu tête brulée là-dessus et j’ai parfois eu des jeans à laver à froid tout leur vie …
J’ai fait faire l’ourlet chez Arthur, le fondateur de SuperStich. C’est la meilleure adresse à Paris (de France ?) quand tu veux retoucher un jean brute en longueur. Prise de RDV extrêmement rapide et flexible. Il te reprend ton jean en 20 minutes avec un magnifique point de chainette réalisé sur Union Special.
Bonus : c’est quelqu’un de humble, sympa et passionné donc n’hésite pas à lui rendre visite. Il a ouvert une boutique 13 rue Racine dans le sixième (GoogleMap). Tu peux aussi lui envoyer ton jean, il suffit de le contacter.
La Paraboot Michael, gage d’équilibre de silhouette
Incroyable le renouveau dont profite Paraboot auprès du grand publique. Et c’est une bonne nouvelle pour une maison française historique qui le mérite.
Je me souviens encore comment je me faisais chambrer il y a 5 quand je sortais des looks comme celui-ci. Aujourd’hui, on voit des Michael partout dans Paris, et pas seulement sur les amateurs de style heritage. C’est devenu un modèle tendance et « modeux ».
Tant mieux !
On en trouvera à la pelle en seconde main dans deux ans quand le vent aura tourné.
Alors qu’elles m’ont longtemps fait mal aux pieds, malgré leur vie d’avant (c’est une paire vintage que j’ai achetée bien usée il y. a des années), c’est ma paire chausson du moment. Va savoir pourquoi, j’ai réussi à les faire et elles apportent du poids pour finir ma tenue.
Au sens propre bien sûr, ça pèse un âne mort, mais surtout figuré. J’aime terminer mes silhouettes très loose sur des chaussures en cuir qui « posent là » la tenue. À l’opposé, en sneakers, je vais avoir tendance à préférer apporter du dynamisme sur la fin. Comme le fait très bien Nikko dans cette tenue.
Plus haut, je disais que le style street heritage réside dans l’approche que l’a des pièces et comment on va les interpréter.
La Michael est un bel exemple.
Dans une tenue très classique, avec un jean « lambda » un peu trop long, une chemise bouffante rentrée dans le pantalon et une veste en tweed, elle ne résonne plus pareil. Tu passes d’une paire un peu mode à quelque chose de pataud et vieillot. Le cliché du notaire de campagne dans les années 80.
C’est un cliché gentillet pour imager, j’aime les notaires (malgré leurs honoraires haha) et je les remercie d’avoir tenu la marque en vie !
Cohérence de volume entre haut et bas
Enfin, bien garder à l’esprit qu’une tenue s’apprécie dans son ensemble et donc de toujours garder à l’esprit que le haut et le bas doivent être harmonieux. Il faut être attentif aux volumes et longueurs pour que tout roule. C’est quelque chose qui se développe avec le temps. S’il existe des conseils génériques, j’ai vu trop d’exceptions pour les distiller à la va-vite.
On en reparlera.
Je pense que l’on a fait le tour de cette veste motif pied de poule et de comment la porter. Je développerai un article autour de ce motif dans les prochaines semaines. Il m’a toujours plus mais pas que sur une veste.
D’ailleurs, les idées de looks et d’associations marchent aussi pour le tweed, le motif prince de galles ou autre donégal. Les draps de laine anglais à motifs classiques sont géniaux à porter de nos jours, suffit de les appréhender à la cool.
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Bonus : tu peux retrouver des looks où le motif pied de poule est porté ici ou là.