Il fait 22 degrés au moment où je t’écris ces lignes mais tant pis. Ma grand spécialité est de shooter des tenues sans pouvoir les poster dans la foulée. Cette année, on va dire que j’ai une excuse valable. Toutefois, avec ce virus qui a figé le monde, j’ai du temps. Je vais donc te parler d’une tenue que j’ai shootée début décembre dans un froid humide. Elle devait me servir d’introduction pour un pan de mon style que je montrais encore peu, que j’aime appelé pour rigoler le Street Sartorial. Autrement dit, cela reste mon approche style street heritage avec une pincée du vestiaire masculin plus habillé. Sous le signe du military vintage, nous verrons que tout se rejoint un peu.
Street Sartorial – piocher dans le tailoring et s’amuser
Tu l’auras compris, ce petit tournant stylistique n’a rien d’un virage à 180. J’ai toujours aimé le style sartorial, que j’appelais avant Internet, « les costumes ». Pourtant, je ne suis pas fasciné par l’homme en costume et ce qu’il dégage, je ne regarde pas les films de James Bond en bavant sur ses tenues.
Je ne regarde pas vraiment de James Bond en fait.
Non, ce que j’aimais ado, c’étaient les vestes en friperie avec des laines travaillées. J’apprendrai plus tard que j’étais devant du tweed, donegual, et autres motifs pied de poule ou prince de galles.
Enfin, tout ça pour te dire que j’ai envie de m’amuser avec ce type de pièces et je te le montrais déjà dans cet article avec une veste déstructurée.
La veste croisée – le boss de fin du style sartorial
Je cherchais un peu d’info sur le sujet et au gré de mes lectures, j’ai réalisé que la veste croisée faisait peur. Elle est présentée comme la dernière étape de ton évolution sartoriale.
Marrant.
Parce que si l’on regarde deux ou trois siècles en arrière, elle trouve ses origines dans le milieu militaire et du sport. D’abords le blazer qui habillait les membres des clubs de cricket et d’aviron puis des marines où le boutonnage croisée apparait. Héritage du caban dont le double boutonnage permet de faire face au sens du vent.
Donc si on se sort de la tête tout ce que l’on peut voir sur Instagram et les blogs de mode masculine, la veste croisée n’est pas qu’une pièce pointue de tailoring ou encore de sprezzatura. Avec le bon tissu et les bonnes associations, on peut se réapproprier la pièce.
Engineered Garments Double Breasted Dexter jacket
Quand on lit les règles pour bien porter la veste croisée, quelque soit le guide, un conseil revient : le prendre bien à la taille, l’approximation n’est pas permise …
Me voilà mal engagé cette Dexter jacket d’Engineered Garments.
Un peu comme le jean size-up du dernier article, c’est une commande qui ne s’est pas déroulée comme prévue.
Enfin, je savais qu’il y avait une chance que ça ne le fasse pas niveau sizing mais j’avais eu un flash sur le shop et je savais que je me débrouillerai avec. La coupe reste permissive.
La pièce est folle, dans la lignée du vestiaire sartorial que développent Daiki Suzuki et son équipe. Un mélange d’élégance classique, de workwear / military et d’une dose de détails décalés.
Très discret et je pense que tu ne l’avais pas remarqué avant mais c’est une veste « two tones » (ou two patterns ici) comme aime les désigner Engineered Garments. Autrement dit, elle est composée de draps de laine différents.
Bien caché hein !?
On peut même parlé de « three tones« , je m’en aperçois sur ce close-up (j’ai une excuse, luminosité faiblarde en hiver haha) :
- drap de laine à chevrons (herringbone) : tu peux le voir sur les poches plaquées et col. C’est le classique tissage en triangle.
- drap de laine Homespun : c’est un type bien utilisé chez EG, c’est d’ailleurs comme cela que j’en ai connu le nom. Comme souvent avec les mots anglais, l’origine est dans son étymologie. Spun, le participe passé du verbe spin=tisser et home=maison => tisser à la maison. Il désigne donc un drap de laine rustique et rudimentaire qui était fabriqué par des ouvriers écossais chez eux. C’est aujourd’hui le nom que l’on donne à un type de drap de laine qui se rapproche dans la texture irrégulière, comme mouchetée selon les couleurs utilisées. Tu peux le voir sur le pan droit (à gauche sur la photo). Une matière workwear à souhait hein !
- drap de laine sergée / twill : il s’agit d’une armure sergée en laine avec les fameuses diagonales, comme tu peux la retrouver sur le denim par exemple. Elle en majorité sur le pan gauche (à droite sur la photo)
Au final, inspiration militaire + jeu de matières anciennes + coupe revisitée, cela ne te rappellerait pas un certain style ?
Ajouter un interliner pour la touche street.
On n’a pas encore aborder le bas mais l’ensemble, sans cet interliner Engineered Garments, aurait de quoi faire chasseur de la campagne anglaise.
J’aime son héritage stylistique mais pas la chasse.
Alors on va éviter d’être trop premier degré.
Dans cette tenue l’interliner apporte plusieurs choses :
- de la chaleur : il vient remplacer une écharpe ou un tour de cou et aussi un petit pull de mi-saison.
- de la couleur : avec le motif à fleurs rouges et vertes, mélangées au gris, cela donne du peps sans sembler débarquer de nul part.
- un jeu de longueur : c’est ce qui fait son charme mais aussi divise.
- casser le coté notable de la campagne : la veste croisée rustique et le cargo au nombril avec des boots à bouts fleuris, j’y allais tout droit. L’interliner modernise le truc et apporte une touche street avec la capuche. Je sors immédiatement du cliché dans lequel j’allais tomber.
Le motif est vraiment fou en plus, chaque IL de cette collection est différent dans la mesure où ils sont tous coupés à un endroit différent du rouleau de tissu.
Petit moment de geek du vêtement : le jeu de textures et de couleurs est vraiment plus subtile qu’il n’en a l’air. Et couplé à l’asymétrie des matières de la veste, cela vient nuancer avec discrétion une tenue.
Dessous, je porte une work shirt Orslow dans un coton façon « vintage ». J’aurais pu placer une chemise oxford Uniqlo ou Gap sans aucun soucis. J’aime avoir une touche de clair quand je fais ce type de tenue. Et ça fonctionne bien avec un bas olive + noir.
Mais on y reviendra.
Toujours mes bijoux en argent vintage
Je ne vais pas en refaire le listing à chaque fois, ça va te souler.
(En revanche, je devrais peut-être faire un article sur mes bijoux avec une MAJ au fur et à mesure, non ?)
Je n’ai qu’une bague, on voit que la photo date un peu. C’est ma chevalière Gilbert Gilbert dont je vous parle bientôt.
Au poignet droit, mes bracelets fétiches avec un petit nouveau ramené par Solara de son voyage sur la cote Ouest des USA. Un bijou mexicain en argent, vintage.
Exercice de style – j’ai remonté mon pantalon
Sans parler de sortir de ma zone de confort, on peut dire que je suis sorti de celle de mes goûts. Porter un pantalon taille haute ou à la taille naturelle, ce n’est pas mon truc. Cependant, je trouve le rendu vraiment chouette sur d’autres mecs et l’article de Matthieu m’en avait donné clairement envie.
Alors go, j’ai tenté une autre silhouette et essayé de garder une touche « agressive » quand même.
Porter un cargo pant taille haute, un défi
C’est le choc des cultures pour moi.
Je n’ai pas de référence cinématographique où le porte de la taille haute se retrouve souvent (Indy, James & consorts). Les militaires n’ont pas leur pantalon sur les hanches, ce n’est pas conçu pour.
Moi, je me sens bien quand mon pantalon tombe sur mes hanches et qu’il respire. C’est comme cela que je me sens libre dans mes fringues. Je n’aurais jamais fait l’expérience avec un jean (c’était un poisson d’avril), mais le cargo pant, pourquoi pas !
J’ai acheté ce pantalon cargo l’été dernier sur Kafka Mercantile. Un shop qui te ruine si tu y passes trop de temps, mais que de belles choses ! Le fait est que c’est une version qu’Orslow a faite spécialement pour eux. Ils ont ajouté des poches à leur easy pant et bam, le voici !
Je ne vais pas te la jouer marketing du superlatif mais que je l’aime.
Comme il était un peu grand (j’ai pris une taille 3 qui fait un bon 32), j’ai pu le remonter sans finir tout serré dedans. Montrer mes attributs masculin ou mon absence de postérieur n’a jamais été ma passion.
La pudeur à la japonaise haha.
Le cordon de serrage suffit à bien le tenir à la taille.
Je ne sais pas s’il est assez remonté pour les amateurs du genre, mais plus haut, j’aurais eu besoin d’une ceinture. Et puis même, là j’aurais été dans le détresse vestimentaire absolue.
Au final, le jeu de longueur avec l’interliner est intéressant et la veste donne l’impression de tomber encore plus bas. C’est ce que je cherchais car je la porte comme un manteau ici.
Bon, et ça me fait de grandes jambes.
Détails dont je me fous complètement.
Je sais cependant qu’on a mis dans la tête des hommes qu’il fallait que leur pantalon donne l’impression d’une bonne longueur de jambe …
#borasdanslanorme
Cheaney – une paire de country boots bien anglaise
Pour terminer la tenue, je voulais forcément du noir. J’ai la chance d’avoir un peu de choix à la maison. Les chaussures / boots noires, c’est ce qu’il y a de plus polyvalent.
En plus, j’avais l’intention de soumettre cette photo à un ami artiste, Jonny Leigh, qui dessine notamment pour Crockett & Jones. Je le sais sensible aux beaux souliers alors je suis parti sur mes country boots de Cheaney.
De la bonne boots de campagne anglaise, comme son nom l’indique.
Semelles commando et cuir grainé robuste, tout ce que j’aime.
Massive avec les bouts fleuris pour le coté brogues.
Et puis avec un pantalon cargo olive remonté comme ici, ça donne un coté military vintage, sans l’être.
Oui, c’est de l’ordre du geekage haha.
Et bien sûr Made in England.
Ça vous évite de vous retrouver avec une paire de brogues aussi effilée qu’une Air Max 1.
Un conseil : n’achète jamais de brogues ou autres chaussures classiques chez des maisons non-historiques. Tu dois être pas mal spammé sur les réseaux sociaux de publicités te vantant des brogues et boots parfaites.
Fuis !
Cherche en seconde main si tu n’as pas le budget, ça pullule avec un peu de patience.
Je ne citerai personne mais les marques digitales toutes jeunes à base de gros blabla et matraquage publicitaire se joueront de toi avec un discours marketing bien rodé.
Tu remarqueras que mes revers sont faits n’importe comment. Dans la vraie vie, on s’en fiche un peu, sur un édito d’un article de stylisme, tu peux me chambrer !
Porter un pantalon taille haute et une veste croisée, exercice réussi ?
Sur le blog, je prône de s’amuser avec ses vêtements et d’essayer, prendre des risques et pourquoi se découvrir.
Stylistiquement bien sûr.
Alors avec cette tenue, je me prêtais à ce jeu, de pousser plus loin et sortir de ma zone de confort. On ne parle bien sûr que d’une façon de porter un pantalon. Mais ça fait 20 ans que je porte mes jeans de la même façon (on y viendra). Je tenais à proposer plus qu’une copie de ce qu’il se fait.
Du coup, qu’en as-tu pensé ?
Et la veste croisée, convaincu(e) par cette façon de la porter loin du style sprezzatura et autre casual chic ?
Je ne sais pas si tu as remarqué mais on a changé le système des commentaires. On a Disqu maintenant, ça te facilitera la tâche si tu veux échanger.
Et moi, je suis dispo pour discuter.
Parce que partager, c’est la base pour progresser dans son style et sa passion 🙂
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Comment porter un pantalon cargo ? retrouve d’autres idées de look : ici avec un mix cargo / fatigue pant
