Ce que je préfère dans l’ampleur et l’approche oversize, c’est la possibilité de réinventer radicalement sa silhouette. De créer des formes alternatives, qui échappent aux diktats du moment, qui libèrent le vêtement de cette idée qu’il serait surtout là pour mieux faire voir (valoir) le corps. C’est d’autant plus fort quand le sujet est féminin. Pas besoin de me croire sur parole : URU en fournit la preuve avec une collection automne/hiver 2025 particulièrement réussie. Marque japonaise confidentielle lancée par le designer Masaharu Urushiyama en 2011, après un passage chez Comme des Garçons en tant que modéliste.

URU – Collection automne/hiver 2025
L’argument (parfois douteux) du « c’est toujours plus beau sur les femmes » revient souvent quand on parle fringues. Au-delà du monde de la chaussure — où la question tient surtout aux pointures et aux formes malheureuses plus qu’au genre — il me semble qu’il traduit surtout un « contraste heureux ». Un décalage, une ambiguïté. Le parti pris d’URU, qui fait porter ses collections (masculines) depuis quelques saisons uniquement par des mannequins femmes, me semble d’autant plus pertinent qu’il prolonge un dialogue déjà entretenu par les vêtements eux-mêmes.
Il y a les coupes, bien sûr, mais aussi la typologie particulière des pièces : costumes, blouson en cuir, pull à col V, veste utilitaire à larges poches, barn coat, manteau croisé imposant, bomber, chinos à pinces, duffle coat, pantalon luxueux qui tombe comme un sweatpants… Un vestiaire masculin casual elevated à la japonaise (j’en parle dans mon dernier article, si tu l’as manqué) aux couleurs chatoyantes qui évoquent immédiatement A.Presse ou Auralee.
L’opulent layering donne un sens à cette débauche de matières. Il y aurait de quoi submerger une silhouette androgyne, mais rien ne semble « trop grand ». La taille est marquée par une ceinture épaisse. Un t-shirt rouge vif dépasse d’un polo vert pâle. Les cols montants de pulls et de chemises portés nonchalamment contrastent avec des outerwear jamais loin d’engloutir l’ensemble — si on les laissait faire. Une tension permanente est à l’œuvre : entre l’habillé et le négligé, entre le modeux et le quotidien.









URU était autrefois distribuée chez l’excellente antenne parisienne de 1LDK, avant sa fermeture définitive. Il faudra désormais se tourner vers le Canada, chez Haven, ou bien commander sur le site japonais, qui comme beaucoup s’est ouvert à une clientèle internationale. URU est à suivre sur insta.