Le polo, le mocassin, et maintenant le pantalon blanc… On achève aujourd’hui une trilogie infernale. Surtout si tu finis par porter les trois pièces dans la même tenue (au moins tu n’auras plus besoin de dire que tu votes à droite). Mais l’objectif de ce nouvel article est encore une fois de regarder un peu plus loin. De ne pas comprendre la pièce par le prisme des clichés et des connotations, mais plutôt de nous concentrer sur la dimension purement stylistique.
Évidemment, je ne vais pas uniquement te parler du pantalon qu’on appelle « blanc optique ». Déjà, parce qu’il n’est pas si commun que ça et qu’il est bien plus difficile à accorder. Et ensuite parce que j’ai de nombreuses raisons de te faire préférer l’écru, le crème, le mastic. Je n’abandonne pas pour autant, on va voir que le « vrai » blanc peut se porter à certaines conditions.
Quelques présupposés sur le pantalon blanc à remettre en question
On va faire les choses un peu différemment pour cette fois. Plutôt que de te présenter une liste d’arguments en faveur du pantalon blanc, je vais commencer par les choses qui lui sont reprochées. Garde seulement en tête que j’apprécie la pièce et que ma vision sur le sujet est un peu biaisée. Pour toi, un point en particulier peut très bien être rédhibitoire. Et c’est pour cela qu’il me semblait important d’écouter en premier ceux qui n’aiment pas ça.
« Le pantalon blanc est une pièce forte et pas facile »
Je l’ai dit dans l’introduction, mais il est vrai qu’un pantalon blanc peut être assez déroutant à porter. Il a ce quelque chose qui vient tout de suite questionner les habitudes en te « forçant » à composer avec une couleur plus foncée en haut qu’en bas. Et c’est beaucoup moins naturel que de mettre un t-shirt blanc, considéré comme un basique essentiel, avec à peu près tout et n’importe quoi. Ce qui est assez drôle, car la vraie difficulté du pantalon blanc est bien dans sa couleur et sa manière de contraster, souvent un peu trop, avec tout le reste.
On pourrait ainsi en conclure que le pantalon blanc est aussi simple à porter qu’un tee blanc, et qu’il suffit juste de penser ses tenues différemment. D’autres diront que ces deux pièces sont en réalité de faux amis. Mon premier conseil, rien de révolutionnaire, serait donc d’opter pour une nuance de blanc qui tire un peu vers le beige. Avec cette pointe de jaune dans la couleur, on perd toute de suite l’effet « pièce forte » pour aller vers une alternative plus claire au chino de tous les jours.
« Le pantalon blanc est contraignant à porter et à entretenir »
Et on ne peut pas non plus échapper à ce qui revient toujours quand on porte du blanc : les taches. C’est un argument difficile à contredire. Si un pantalon blanc ne va pas plus attirer les taches qu’un autre, il va les rendre très visibles. Enfin, le blanc peut également jaunir ou se rapprocher du gris. Contrairement à beaucoup d’autres vêtements qui se patinent et deviennent plus beaux avec le temps, ce n’est pas forcément son cas.
Il faut donc à la fois faire attention quand tu le portes (regarder où tu t’assoies, penser aux pièces en cuir qui peuvent déteindre comme la ceinture ou les chaussures…) et quand tu l’entretiens (laver seul ou uniquement avec du blanc, passages au pressing…). Personnellement, je pense que le pantalon blanc demande un certain état d’esprit. Il faut ici savoir se détacher un peu (sans mauvais jeu de mots) de ces considérations. Ou bien se résoudre aux pantalons blancs qui ne sont pas « fragiles », comme un jean ou un baker pants.
« Le pantalon blanc est connoté négativement »
J’ai gardé le plus subjectif pour la fin avec la question des connotations associées au port du pantalon blanc. La première chose qui me vient, c’est tout ce coté exubérance à l’italienne. Ensuite, les soirées blanches. Puis la jeunesse dorée. Il y a aussi « le pantalon blanc, c’est pour les femmes ». Car, comme nous le savons tous, la mode en tant qu’affaire superficielle est bien réservée aux femmes. Et que nous les hommes, on achète un seul pantalon « ultime » bleu marine…
Tu le sais, mais on essaye sur ce média de ne pas trop prêter attention à toutes ces choses qui relèvent plus du fait social que de la vérité stylistique. Cela reste néanmoins quelque chose qui existe, qu’on ne peut pas totalement ignorer. Peu importe ce qui te vient en tête, n’oublie pas que ces idées peuvent toujours être exploitées et détournées. Si tu n’aimes pas le coté trop précieux du pantalon blanc, change le pour un jean. Oublie les mocassins élégants pour une paire de Paraboot et rajoute une veste militaire. Tant que tu abordes la question par l’angle du style personnel, tu évites le stéréotype.
Bien porter le pantalon blanc
Je ne sais pas si je t’ai convaincu par ma bonne parole (ce n’était pas spécialement le but), mais nous allons maintenant essayer de nous défaire de l’image d’Épinal du pantalon blanc. Le fameux chino slim taille basse et roulotée aux chevilles, ambiance Côte d’Azur.
C’est déjà bien le choisir
Je vais me répéter un peu, mais la manière la plus simple d’intégrer un pantalon blanc à son vestiaire reste d’en choisir un qui s’éloigne du blanc optique. Toute couleur un peu trop « franche », comme un bleu « trop bleu », n’est pas facile par nature. Ce n’est pas quelque chose de propre au blanc. La grande différence, c’est évidemment que ça contraste très fort ! Peu importe la nuance choisie, je te conseille en tout cas d’éviter les teintures cheap (on parle des marques juste après). Il n’est pas possible de faire illusion avec un vêtement aussi visible.
Et c’est logiquement la même chose pour la coupe. Je t’ai parlé de l’importance de couper son pantalon à la bonne longueur dans mon dossier sur le style oversize. C’est encore plus déterminant ici, surtout si tu pars sur de l’ajusté. Rien de pire qu’un pantalon blanc mal coupé ou trop long. En règle générale, je te conseille de partir sur un peu plus d’ampleur que pour une couleur plus classique. Quitte à porter quelque chose de très peu discret, autant aller au bout de la démarche et en profiter pour jouer avec les volumes.
Exploiter son potentiel
On a parle souvent de « pièce forte » pour caractériser le pantalon blanc. On sous-entend ainsi qu’il se suffirait à lui-même. Il est vrai que, contrairement au tee qui a souvent besoin d’être accompagné pour être intéressant, le pantalon blanc peut se porter seul sans finir avec une tenue un peu chiante à la fin. Mais je ne crois pas non plus qu’ajouter un autre élément « fort » reviendrait à en faire un peu trop.
Car le pantalon blanc est pour moi une base quasi neutre qui justement doit nous emmener vers autre chose. En somme, il a exactement la même fonction que le t-shirt blanc : apporter de la lumière à une tenue, s’accorder à tout ce qui l’entoure et permettre le layering. D’où l’importance du bon choix de la nuance ! Pour du blanc optique par exemple, exploiter son potentiel revient alors à penser dès le départ la notion de contraste au sein de la tenue.
Le porter en été, mais surtout en hiver
J’aurais pu aborder le sujet dans la première partie sur les présupposés, mais le pantalon blanc souffre un peu de son image de vêtement estival. Oui, ça fonctionne évidemment dans une tenue d’été avec des nuances pastel et dans un esprit très décontracté. Mais ça s’accorde aussi merveilleusement bien avec les couleurs de l’automne et les tons « terre » en général ! Avec de l’olive, du bordeaux, du terracotta… Et forcément avec le gris et le noir, pour les plus minimalistes d’entre nous.
Quand tout le monde se met à porter du bleu marine et que les tenues s’éteignent dans la grisaille, c’est bien le bon moment pour ramener un peu de lumière dans tout ça. Il y a toujours ce sentiment d’inattendu quand le blanc fait irruption dans une tenue hivernale. Non seulement tu évites toute connotation Riviera, mais tu ouvres également le champ des possibles quant aux associations de couleurs. Et si tu veux plus d’inspiration, Boras a écrit un article sur le sujet !
Le pantalon blanc en trois registres : de l’inspiration et des marques
Je trouvais intéressant de terminer ce petit article par une démonstration concrète de ce qu’il est possible de faire en prenant un pantalon blanc comme point de départ. Afin de définitivement oublier les clichés, je te propose quelques marques qui font les choses différemment.
Pour du pantalon blanc bien solide
Pour ceux qui sont encore un peu réticents, on va commencer par quelques recommandations pour un pantalon blanc qui ne craindra pas les taches. Et forcément, je ne peux que te conseiller le jean comme premier choix. Un Levi’s vintage fera très bien le job si tu cherches à expérimenter ! Ou un Uniqlo, si la marque se décide un jour à ressortir ses meilleurs coupes tapered.
Une fois que tu as passé le cap, miser sur les registres miltary et workwear est un choix judicieux si tu veux oublier le tailoring à l’italienne. Tu peux alors regarder chez orSlow et son « French work pant ». Je pense aussi à Arpenteur, *A Vontade ou encore à 1ST PAT RN pour des pantalons blancs solides dans des coupes droites.
Pour expérimenter avec les volumes et les contrastes
J’ai joué un peu le jeu avec les connotations tout à l’heure. Mais quand tu me dis « pantalon blanc », je pense personnellement tout de suite « épure », page vierge, et d’autres trucs prétentieux. « Minimalisme », en gros. Si ce sont les volumes et les contrastes qui te plaisent dans le pantalon blanc, alors je pense immédiatement à Studio Nicholson.
La marque propose notamment du blanc optique sur des coupes très maitrisées, amples et courtes. Si tu as encore plus de budget, je te renvoies vers Polyploid dont tout le concept tourne autour du blanc comme couleur originelle. Il m’arrive souvent de citer Olive Clothing dans mes articles. Je pense que c’est encore une fois une bonne piste pour s’essayer à tout ça à moindre frais. Et sans avoir trop peur de massacrer son pantalon neuf à 400 balles au premier repas…
Et si je t’ai parlé ici du minimalisme, les mêmes principes peuvent s’appliquer au streetwear. Un style qui adore, à sa manière, les contrastes et l’ampleur.
La couleur de l’élégance et de la décontraction
Dernier « registre » qui m’intéresse aujourd’hui, l’univers casual-chic étendu. Je sais que ça ne veut pas dire grand chose, alors on va s’accorder sur une définition pour le temps de cet article : « Tout ce que tu ne dois pas tacher et qui peut se porter avec un blazer ». J’aimerais d’abord reparler un peu du cas du jean. Je te conseille d’abord d’aller voir ce que fait Superstich avec son LR-01 blanc. Sinon, Resolute et Drake’s c’est très bien aussi !
En chino blanc d’inspiration militaire qui s’intègre très bien à un style habillé, je pense à Casatlantic et Brut pour de la vraie taille haute avec de l’ampleur. Et si tu veux du Riviera sans l’ambiance Eddie Barclay, Aimé Leon Dore me semble être une très bonne source d’inspiration.
Une vision contemporaine du casual qui utilise la couleur blanche à très bon escient. Enfin, tu peux regarder chez Scott Fraser, Berg and Berg, Barena ou encore Athi Editions pour du pantalon blanc soft-tailoring !
Le mot de la fin
Pour conclure, je dirais qu’il faut voir le pantalon blanc comme n’importe quelle autre pièce qui ne t’est pas immédiatement familière. T’habituer à l’idée en parcourant les lookbooks des marques qui font les choses bien. Peut-être commencer par un modèle accessible, pour tâter le terrain. Le choisir en fonction de ton style, de tes goûts et évidemment selon le contexte. Et surtout oublier ceux qui en parlent comme un choix audacieux, presque subversif. Ils vivent dans leurs mondes. Personne ne prête vraiment attention à la couleur de ton pantalon. Le principal est que tu te sentes bien dans ce que tu portes ! Et avec l’inspiration distillée ici, tu as déjà quelques pistes à suivre…